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Le
bonheur à Bercy
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Quand on vous voit tous réunis, l'émotion est trop grande. "
Quand elle est apparue
dans sa robe de métal, scintillant sous les projecteurs, un frisson de
plaisir a parcouru la salle.
"Quelle est belle !" C'est vrai qu'elle était belle, Hélène,
rayonnante de bonheur, souriant à ses admirateurs venus par milliers au
rendez-vous de Bercy. "Vous m'avez beaucoup manqué !" leur a-t-elle
avoué après leur avoir chanté "Moi aussi je vous aime", la première
chanson de son nouveau spectacle.
Car après son triomphe au Zénith et en tournée, l'année dernière, Hélène
n'avait qu'une hâte : retrouver ce public qui, à chaque concert, chante
en chur avec elle.
COMPTE
A REBOURS
Quelques heures avant la première, calme et souriante, elle devisait tranquillement
dans la salle de restaurant de Bercy. Les cheveux ramassés en queue de
cheval, en jean et en pull, elle parlait de tout et de rien, de son
adolescence, de cette fois où elle était partie de chez elle, avec sa
guitare pour tout bagage, ou encore de ce fou rire pris avec sa petite
sur Virginie à un arrêt de bus, au Mans et du coup de téléphone
qu'elle lui a passé la veille, pour lui souhaiter son anniversaire.
Mais
déjà, on devinait la tension qui montait. Même si ses mains tremblaient
moins qu'à son arrivée à Bercy, elle allait avoir le trac ! "Je sais
qu'avant de monter sur scène, je vais ressentir une grande angoisse. Mais
c'est bien. C'est aussi une manière d'honorer le public. Pour conjurer
le trac, j'ai décidé cette année de n'ouvrir aucun télégramme, de ne lire
aucune des cartes qui accompagnent les bouquets de fleurs. L'année dernière,
les encouragements que j'avais reçus m'avaient donné encore plus le trac."
Hélène a fini son déjeuner. Une blague à son producteur, un dernier sourire
au régisseur, et elle file dans sa loge, bien avant l'ouverture de la
salle. Pour elle, c'est vital. Elle a besoin de s'isoler, de se concentrer.
D'ailleurs, personne ne s'est approché. Ni ses parents et ses surs,
ni ses amis, Patrick, Lynda, Laly et Sébastien, Laure, Olivier, Nicolas,
et de nombreux comédiens, qui d'un commun accord ont décidé d'attendre
la fin du concert pour venir l'embrasser.
C'est presque machinalement qu'elle lave ses cheveux pour les confier
ensuite à Nicolas, son coiffeur, qui, sans prononcer un mot pour ne pas
la déconcentrer, lui fait un brushing avant de s'éclipser.
Entourée
des gerbes de fleurs qui embaument sa loge, Hélène ferme les yeux, fait
défiler le spectacle dans sa tête, puis enfile son costumede scène que
Cathy, son habilleuse, a déposé sur un cintre. Un habit de lumière tout
en cuir doré, que Paco
Rabanne a dessiné pour elle.
HELENE,
DANS DIX MINUTES !
Dans la salle, le public scande son prénom. Comme un roulement de tambour
annonçant son arrivée, dix mille voix s'impatientent, vingt mille pieds
battent le sol. Quand la lumière s'éteint, Hélène se prépare, debout sur
la plate-forme qui bientôtva s'élever pour rejoindre le haut de l'immense
guitare inclinée vers le public. Ça y est, la voilà. Le teint pâle, la
voix douée et la démarche lente, elle descend vers son public qui déjà
entonne avec elle le refrain de sa première chanson. "Moi aussi je
vous aime. Je suis émue, vraiment très émue..." Puis
elle vacille, et lentement, comme au ralenti, tombe sans connaissance.
A cette seconde, Bercy a tremblé pour sa vedette.
Tout comme Elton John lors d'un concert en Australie, Hélène a succombé
à un trop-plein de bonheur !
Dans un silence total, la belle Hélène, toujours évanouie, est transportée
en coulisse...
"Excusez-moi ! Quand on vous voit tous réunis, l'émotion est trop
grande." Elle est revenue, après quelques minutes pendant lesquelles
le public, par crainte, par respect aussi, n'a pas voulu briser le silence.
Et c'est
avec ferveur que de jolies brunes aux yeux brillants, de jeunes blondes
aux longs cheveux coiffés à la manière de leur héroïne, reprennent avec
Hélène sa chanson fétiche : "Je m'appelle Hélène".
GRANDIE
PAR L'EMOTION
Elle est donc encore plus belle quand elle réapparaît, en haut de la grande
guitare, dans sa robe de métal. Grandie par l'émotion que chacun a partagée,
virevoltant d'un bout à l'autre de la scène, elle tend son micro au public,
l'encourage à chanter plus fort, le prévient en riant : "Attention,
méfie-toi des garçons !", avant de prendre sa guitare pour un moment
plus intime, assise sur le devant de la scène, chantant dans la lumière
tamisée.
Au milieu des spectateurs, Marc et Mireille, ses parents, reprennent leur
souffle. La douée Hélène dont ils sont tellement fiers leur a fait une
double peur. En se faisant faucher par l'émotion, elle a emporté avec
elle Sophie, sa grande sur, qui à son tour s'est évanouie. Mais
maintenant, tout va bien. Plus soudée que jamais, la famille regarde Hélène
reposer sa guitare et se lancer dans un blues échevelé, dansant avec les
choristes, lunettes noires, chapeau sur la tête et grande veste noire,
à la façon des Blues Brothers, avant de lancer son chapeau au public.
Dans
la salle, on se lève. Hélène jongle avec le tempo, passant avec allégresse
du country aux ballades, remontant tout en haut de la guitare pour changer
de tenue et réapparaître, longiligne, vêtue d'un bustier ajusté pour chanter
l'amour.
Emporté par le rythme, le public se presse, bouquets de fleurs au bout
des bras. Impossible d'attendre plus longtemps le moment d'approcher tout
près de la scène, pour peut-être avoir la chance de saisir un regard,de
toucher sa main. Ce
soir-là,
Hélène est montée au firmament.Elle s'est laissé porter par la joie. "Mais
je n'ai presque pas de souvenirs de ce premier concert. Tout s'est passé
tellement vite ! J'ai eu l'impression qu'il ne durait que quelques secondes.
Quand j'ai rechanté "Moi aussi je vous aime", au dernier rappel,
j'aurais pu recommencer au début, repartir tout de suite pour un nouveau
spectacle."
Deux
heures, ça paraît court quand on a des tonnes d'amour à offrir. Les bras
chargés de fleurs, Hélène est retournée dans sa loge, ouvrir enfin ses
télégrammes. Heureuse d'avoir retrouvé son public qui lui avait tant manqué,
triste de l'avoir déjà quitté, impatiente d'être au lendemain, pour entendre
les milliers de voix qui reprennent ses chansons à l'unisson, retrouver
les milliers de regards qui, chaque soir, à Bercy et dans toute la France,
attendent qu'elle leur dise, une fois encore, "Moi aussi je vous
aime !"
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